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Droits voisins vs Google : C'est quoi le problème ?


Thoscellen

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Hello à tous,

C'est un sujet a polémique, un torchon qui brule et consume un lien délicat entre la Presse traditionnelle française et les Moteurs de recherche, mais aussi un feuilleton en plusieurs saisons pouvant faire facilement de l'ombre a Plus Belle La Vie : Google abuse la Presse Française ! Dans la dispute, la presse reproche le vole de son contenu par le géant de la recherche ; tandis que l'autre se défends dans son rôle de moteur de recherche. Mais c'est quoi le problème dans ce couple là ? Qu'est-ce que la presse reproche exactement a Google ? Et alors que nous, INpactiens, nous cantonnons à nous gausser de la presse traditionnelle, accompagné d'un regard réprobateur envers ces institutions d'un certain âge, est-ce que nous avons bien compris le sujet ? Est-ce que nous ne serrions pas finalement aussi aveugle que ceux que l'on reproche ? Exercice de synthèse.

Divulgâcheur

Après tant d’années de SEO (search engine optimisation), de mitraillage de millions de cookies sur les écrans des lecteurs, d’implantations de boutons de partage, éditeurs et agences rêvaient d’un scénario en or : tirer davantage profit de leur « Googlodépendance », maximiser leur présence sur les réseaux sociaux, en faisant payer ces géants du Web. Une presse aux abois qui allait pouvoir biberonner du droit voisin sur les mamelles de Google, comme ces subventions annuelles réclamées du ministère de la Culture.

D’un claquement de doigts, ce pilier du texte européen s’est cependant effondré. Le « voleur » Google a décidé de ne plus « voler » : dès demain donc, il désactivera l’affichage des extraits dans son écosystème que ce soit Google Search, Google Actualités, YouTube… Et voilà comment se referme la caverne que la presse croyait d’Alibaba.

Droits voisins : Google ne bafoue pas la loi — NextInpact, octobre 2019

La perche était la depuis le début, et la réaction de Google pour moi aussi, est sans surprise. La Presse est à la recherche de revenus et ne pensait pas le géant de la recherche irai se démembrer de ses fonctions. Pourtant, il me semble logique que Google se pénalise lui-même, mais dans une bien moindre mesure.

Brève histoire de la crise de la presse

Si ma dernière phrase vous questionne, je vais quand même faire une mise en contexte. Quand on parle de la presse, on parle en fait d'une presse très spécifique : La Presse Quotidienne Nationale (PQN). Les autres formes de presse, en particulier la Presse Gratuite et la Presse Spécialisée sont en fait peu concerné par la crise. Tel que je la perçois, cette crise existe depuis presque 15 ans et est, je pense, issue d'une multitude de facteurs.

Divulgâcheur

La crise de la presse quotidienne est causée par un cumul de facteurs endogènes et exogènes. Aux facteurs propres à notre presse quotidienne d’information générale et politique payante pour des raisons de nature historique, institutionnelle et économique formant une « culture française de la presse », s’ajoutent des facteurs communs à toutes les presse quotidienne d’information générale et politique payantes pour des raisons de nature essentiellement technologique.

Crise de la presse quotidienne française — Wikipédia, septembre. 2019

Selon Wikipédia, la crise est issue :

  • d'une érosion du lectorat
    • (selon moi) Nourrie par une méfiance des contenus produits et de la neutralité des éditeurs (Clientélisme, Propagande)
    • D'une évolution des modes de consommation de l'information et de la culture
  • d'une concurrence des autres formes de presse
    • Dont la presse gratuite et financée par la publicité
    • Dont la presse en ligne
    • Dont les réseaux sociaux et des blogs
  • de l'évaporation des ressources publicitaires classiques
  • des contraintes économiques propre à la presse (structurelle, lié a l'impression, la masse salariale, la distribution)

C'est intéressant de noter que dès 2010, la manière traditionnelle de faire de la presse commençait à ne plus être en face des usages. La question de la manière de consommer la presse naissait, sans que l'on en connaisse encore bien la forme :

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«Nous avons réussi à faire passer l'idée qu'il pouvait exister une presse sans qu'il y ait de journal, explique Philippe Jannet. La loi de 1881 envisageait la presse sous l'angle unique du support et non celui du contenu. Le risque était alors que la liberté de la presse s'arrête aux limites du papier. En créant un statut d'éditeur en ligne, on a permis de transposer cette liberté sur n'importe quel support numérique, existant ou à venir.» «Il faut que les éditeurs comprennent que le papier n'est plus qu'un écran parmi d'autres, ajoute Walter Bouvais, confondateur de Terra Eco. Ça n'a pas de sens de maintenir la distinction entre la presse traditionnelle et la presse en ligne. Le problème, c'est que beaucoup d'acteurs traditionnels n'en sont même pas à cette étape bimédia. Pourtant, raisonner en termes bimédias (et pis encore, ne penser qu'au papier), c'est déjà prendre du retard sur les usages.»

«Toute la structure réglementaire est imprégnée de cette logique, poursuit-il. Quand on vend un journal papier, on vend un objet; sur le Web, on vend plutôt une idée dématérialisée. Du coup, quand les instances paritaires examinent une demande d'aide, ses membres considèrent souvent l'aspect commercial (fabrication et distribution du support, prix) avant de se préoccuper du message véhiculé, ils se demandent quelle est la part de son chiffre d'affaires papier et la part Web. C'est parfaitement artificiel. Interrogeons-nous plutôt sur la qualité de l'information.»

Car plus que la distinction papier ou Web, c'est la répartition de l'effort entre restructuration et innovation au sortir des états généraux qu'il convient d'interroger. En consacrant 600 millions d'euros à l'un contre 60 à l'autre, l'Etat a envoyé un message très net à la vieille presse venue tendre la sébile. «Quand je rencontre des éditeurs, explique le député (UMP) Patrice Martin-Lalande, rapporteur de la partie médias du budget de l'Etat, je leur demande ce que sera la presse de demain, quel est le chemin à parcourir pour y arriver et comment réviser les aides de l'Etat pour que le chemin se fasse le plus rapidement possible, car il y a urgence. Jusqu'à présent, on me répondait qu'il fallait d'abord survivre.»

Crise de la presse: comment fut loupé le virage du numérique — Médiapart, janvier 2011

On note que la presse traditionnelle est trop préoccupée à survivre dans son format d’antan pour se questionner à chercher de nouvelle formes de revenus contemporains. On peu dire qu'elle se condamne elle même ainsi, en ayant peur de faire une transition qu'elle n'arrive pas à projeter : En quoi doit-elle se transformer pour survivre? Et quel modèle économique : Publicité, Abonnement, Investissement, Financement publique ?

Distribuer la presse en ligne

Alors que florissait sur le jeune web, une presse spécialisée baignant dans le milieu qui l'avait vue naitre, et qui n'avait pas les couts de l'impression et de la distribution sur le territoire pour survivre ; la presse traditionnelle doit faire face à la migration de ses lecteurs vers les formats dématérialisés. La presse spécialisée, peu nombreuse, pouvait profiter de la force des moteurs de recherche pour gagner en visibilité.

Pour la presse traditionnelle, la migration est plus compliquée : Les sites web sont peu vecteurs de clients et couteux. Et les usagers ne se fidélisent pas, ils picorent le contenu qu'ils ont cherché sur un moteur. Très vite, des agrégateurs de niouzes sont créé par les moteurs de recherche afin d'exposer l'actualité. Google News apparait en 2009 en France.

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60 millions d'euros pour aider à la « transition numérique » : en acceptant de financer une partie des éditeurs de presse, dans le cadre d'un accord forcé par l'Élysée mais tenu secret, Google consolide sa position dominante. Les médias traditionnels admettent combien ils sont mal en point. [...]

La presse française, elle, a uniquement trouvé une nouvelle poche où piocher pour quelque temps de l’argent. Sans régler aucun des problèmes qui la minent et plombent son tournant numérique. Mais leur précipitation à empocher les millions d’euros de Google souligne aussi l’état de délabrement de leurs finances, et leur manque de solutions pour y remédier.

D’abord, Google versera 60 millions d’euros, en une fois, qui viendront abonder un fonds d’aide à la transition numérique. C’est un joli coup pour l'entreprise. En versant une seule fois de l'argent, elle éloigne pour un sérieux bout de temps le spectre d’une loi, qui l’aurait obligée à payer pour chacun des articles qu’elle recense.

Et puis, le mastodonte du net gagne un droit de regard sur l’avenir de la presse, la rendant encore un peu plus dépendante de ses services. En effet, l’argent sera attribué à des projets sélectionnés « selon leurs mérites en terme de transition vers le numérique », a indiqué Hollande. Les projets seront choisis par le conseil d’administration du fonds, qui ne comportera pas de représentant de l’État, mais des émissaires de Google, accompagnés d’envoyés des éditeurs de presse et de personnalités indépendantes

Accord Google: l'aveu de faiblesse de la presse — Médiapart, février. 2013

L'un des points qui fait débat, c'est le pouvoir, le contrôle et l'influence de Google exerce sur l'accès et la consommation de la presse en ligne, et ainsi, directement sur les revenus de ces derniers. En effet, en proposant des algorithmes pour afficher du contenu a ses lecteurs, Google contrôle la distribution des articles et exerce un filtre sur l'information que les média ne peuvent influencer ni comprendre : L'algorithme est privé et piloté par Google uniquement. Au point que Google tente même de fournir un moyen d'abonnement à ses partenaires :

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Le programme « First Click Free » prend fin alors que le géant du Net veut mettre la main sur le parcours d'achat, espérant que les éditeurs se laisseront à nouveau faire. [...] Si la société se place comme un recours aux utilisateurs et aux éditeurs, ne cherchant que l'intérêt de l'un et de l'autre, il ne faut pas être dupe. Derrière cette annonce se cache la question des données de paiement des internautes et de leurs habitudes de consommation de contenu en ligne.

Des informations que Google se fera un plaisir de récolter afin de les mettre à disposition de ses « partenaires », dans des conditions assez larges sans doute dans les premiers temps… mais qui pourraient être amenées à évoluer par la suite. Qui sait ? Dès lors, il ne faut certainement pas voir dans cette annonce une évolution positive du modèle de la presse en ligne,  mais bien une volonté de devenir un acteur incontournable dans une part croissante du modèle économique des éditeurs.

Presse en ligne : Google met fin à « First Click Free » et veut faciliter l'abonnement — NextInpact, octobre 2017

De ce point de vue, c'est plutôt logique que la Presse essaye de faire valoir que Google est bien plus qu'un index du web, mais a en fait le potentiel pouvoir de manipuler l'information, voir d'appliquer une censure qui lui es propre. C'est pour cela que la presse est aussi remontée contre Facebook et autre réseau sociaux : Leur manière de montrer l'information peux relever d'une forme d'éditorialisation du contenu. Mais ça n'est qu'une partie du problème :

Le partage des revenus

Si la presse est si énervée que l’Europe ne les couvrent pas d'avantage, ça n'est pas parce que Google ne leur fait pas assez de publicité, ni que les extraits d'actualités soient une forme d'abus du droit d'auteur (L’AFP traîne Google devant la justice américaine — ZDNet.fr 2005), ni même que les extraits d'actualités réduisent le trafic sur les sites des Presses, et donc leur revenues publicitaires propres ; mais parce Google se fait beaucoup d'argent en exerçant sa fonction de régie publicitaire, en générant des profils d'utilisateurs issue de nos usages qu'il revends à des régies publicitaires, mais aussi en affichant des publicités sur ses propres outils.

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According to the News Media Alliance, between 16% and 40% of Google search results are news content. Google’s revenue from its distribution of news content is only $400m less than the $5.1bn brought in by the United States news industry as a whole from digital advertising last year.

The industry body warned that the figures may in fact be conservative, since the report does not seek to include the value of users’ personal data each time they use the search service to click on a story. [...] In 2009, Google News had approximately 24 million monthly unique visitors in the US, compared with 50 million for both CNN and the New York Times. By May 2018, Google had approximately 150 million unique monthly visitors in the US, close to double the numbers for CNN and the New York Times.

Google made $4.7bn from news sites in 2018, study claims — The Guardian, juin 2019

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Selon la présidente du groupement, Google France génèrerait un chiffre d'affaires situé entre 1,3 et 1,5 milliard de dollars, alors qu'il ne déclare que 40 millions d'euros aux impôts, grâce à une exploitation de la fiscalité européenne. [...] En somme, Google n'a pas de raison de se plaindre, d'autant que son service « Actualités s’est construit avec nos contenus » rappelle Corinne Denis, qui rajoute que « s’ils ont tenu leur promesse de ne jamais vendre de publicité sur Google Actualités, en incluant les news dans le moteur, ils ont habilement contourné l’obstacle ».

Taxe pour la presse : Google n'est pas une vache à lait selon le Geste — Next Inpact, 2012

Ce que la presse à du mal a accepter, c'est donc cette différence de revenues affiché par un géant ayant une place prédominante dans l'accès au web et à la presse en ligne et leur propre revenue qui est issue d'une méthode dont ils ne sont pas les experts : la publicité en ligne.

Reprenons :

  • Originaires d'un modèle a abonnement payent, la presse traditionnelle doit s'adapter a un modèle conçu pour une consommation gratuite (financé par la publicité)
  • Modèle lui-même contesté par les consommateurs saturés de "SEO (search engine optimisation), de mitraillage de millions de cookies sur les écrans des lecteurs, d’implantations de boutons de partage" et plus simplement de publicité intrusive, dont les ads-blocks asphyxie les éditeurs, mais pas les diffuseurs
  • Les solutions alternatives sont encore peu accepté par les internautes et seuls des cas marginaux (Médiapart) ou des marchés de niches survivent (Arrêt sur Image)

Ainsi, la presse observe les revenues que leurs contenus génèrent dans leur ensemble, c'est à dire sur toutes les plateforme, en incluant les réseaux sociaux :

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Logique, une information de qualité coute chère à produire, il est donc normal que les recettes publicitaires qu’elle génère sur le net reviennent en partie à ceux qui la produise.

On n'arrête pas l'éco — France Inter, octobre 2019

Et Google de défendre sa position :

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"Nous n'avons pas l'intention de payer une licence pour la reprise d'un extrait d'un contenu", a confirmé ce mercredi Richard Gingras, vice-président chargé des médias chez Google. Question de "principe", a-t-il insisté.

Google, estime-t-il, donne déjà "beaucoup de valeur" aux organe de presse. D'abord, en orientant les clics des internautes vers leurs sites (8 milliards en Europe, estime le moteur de recherche). Ou encore grâce au partage de revenus de ses outils publicitaires (13,2 milliards d'euros versés l'an dernier dans le monde, toujours d'après Google). Ou, enfin, par le biais de dons directs, à l'exemple du fonds Google News Initiative (100 millions de dollars en France en cinq ans, insiste Google).

Pliez ou disparaissez : l'ultimatum de Google à la presse européenne — Marianne, septembre 2019

Je vous disais plus haut que Google se coupait un doigt en faisant ce choix : En étant forcé de réduire le confort d'utilisation et l'expérience utilisateur de ses produits, il prends le risque de voir partir une partie de son trafic et donc de ses revenus. Mais finalement, cela concerne la France, et seulement la presse qui refuse la diffusion d'extraits, Google peut essayer de mitiger les effets négatifs de la loi et de sa décision.

Comment rebondir ?

Pour conclure, j'aimerais pointer du doigt l'évolution de ma perception de la problématique : D'un coté, je trouvais que la presse exagère de réclamer encore et encore de l'argent, soit par l’intraveineuse que sont les subventions de l'Etat ; soit en osant réclamer de l'argent à son principal distributeur. Comme beaucoup d'entre vous :

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Franchement qui s'arrête aux extraits de Google actu ? Pas moi en tout cas. Si l'actu m’intéresse je vais sur le site -> gain de visites. Les extraits sont tellement court que cela donne à peine le ton de l'article...

Google actu (comme Search) c'est théoriquement du win-win. Si ce n'était pas le cas, aucun site n'activerait la précieuse balise META.

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Sans contester que cela arrive, il n'empêche que, eux, profitent allègrement de ce coup pourri pour s'enrichir sur notre dos ; en effet, tous les utilisateurs ne sont pas des pirates ! Eux, OUI !
Alors, nous pouvons imagier ce qui se serait passé si cette nouvelle loi sur les droits voisins avait été écrite intelligemment ? Une nouvelle porte ouverte à un racket qui ne tarderait pas à s'étendre aux particuliers.

Divulgâcheur

ok on peut pas obliger une entreprise à fournir un service et en plus à payer pour ça

Et c'est logique : La presse est très loin d'être irréprochable, et on ne voie pas la valeur ajoutée ni la "qualité" quand un journal ne reprends que des faits d'actualités et des articles d'AFP, voir des nouvelles de Twitter. On ne peux être que fâché lorsque la presse produit de la publi-rédaction, oriente les débat et l'information et qu'elle pratique le clientélisme. On lève aussi un œil méfiant lorsque ils nous assurent nous protéger contre les fakes news, connaissant leur passé contestable :

Divulgâcheur

Face aux campagnes de désinformations qui fleurissent sur le net et que relaient sans contrôle les moteurs de recherche, c’est une raison de plus pour rémunérer ceux qui le font à leur place.

On n'arrête pas l'éco — France Inter, octobre 2019

Mais d'un autre côté, c'est important de voir le problème de la distribution d'argent dans son ensemble. Je n'aime pas faire les comparaisons, mais je serais ravis de débattre de la validité de celle-ci :

Comme pour le Lait, il s'est avéré que les Distributeurs et les grandes surfaces prenaient une part non négligeable des revenus de la vente du lait aux utilisateurs finaux ; en dépit des éleveurs qui n’en récupérait que les miettes. Il était alors urgents de renégocier le prix du lait et la redistribution des revenues entre tous les acteurs.

De ce point de vue, il est logique que Google et les autres diffuseurs aident aussi la presse financièrement, c'est elle qui produit le contenu.

"Ok Google, écouter l'actualité."

Ce que je voulais dire dans la sections précédente, c'est que j'ai fait évoluer mon point de vue en me renseignant, et que j'espère faire aussi évoluer le votre avec ce que j'ai apporté. Mais je sais que même ainsi, je ne vois peut-être pas l'affaire dans son ensemble ; et là, j'aimerais bien aussi avoir vos points de vue. Si vous n'êtes pas d'accords avec moi, en quoi ? Pensez-vous que j'ai mal interprété une situation ?

Pour conclure, j'aimerais présenter quelques perspectives : Celle de reprendre le contrôle de la distribution de l'information en France, celle d'oser les nouveaux formats d'abonnement et celle de valoriser de la qualité du traitement de l'information. En fait, celle qui est de dessiner le futur de la consommation des médias AVANT que Google ne le fasse.

Celle aussi d'une nécessaire mutation de la presse dans son ensemble. Une transformation des segments (presse quotidienne, spécialisée, hebdomadaire) qui sur le support papier sergmentait une forme de financement, vers un autre découpage, par exemple : Une presse d'enquête, de fond nécessairement couteuse ; et une presse du relais de l'information, gratuite et financée par la publicité.

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Très bonne analyse, et intéressante. J'ai envie de faire 2 remarques :

 La première, c'est au sujet des actualités qu'on lit sur les plateformes comme Google News ou Facebook et qu'on irait lire plus en détails sur le site les informations qui intéresse l'utilisateur.

D'abord, je pense que la plupart du temps, on ne va pas lire l'actualité, on se contente de lire le titre. Actuellement, on est surinformé et on utilise Gnews ou Facebook plutôt sur le petit écran d'un smartphone à n'importe quel moment, dans n'importe quelle situation (économie de l'attention, frénésie du pouce sur l'écran tactile, etc).

Ensuite, ne lire que le titre n'empêche pas de devoir payer l'article. Je m'explique. La presse est une activité qui exige des coûts fixes. Chez le marchand de journaux, sans payer, on peut lire la couverture, le sommaire, mais si on se met à feuilleter le journal chez le marchand de journaux, même pour ne regarder que le titre des articles, le commerçant va vite nous demander de payer ou de reposer le journal.

Enfin, quand un éditeur de presse papier pense numérisation de son activité (ou "digitalisation" ou "transformation digitale"), il pense immédiatement à nouveaux marchés, nouvelles habitudes, grandes plateformes de webmédias (dont plusieurs services de Google, notamment Gnews). En dehors de la valeur publicitaire captée par Google (très bien décrite dans l'analyse ci-dessus), je pense qu'il y a tout un monde inconnu de possibilités et de risques auxquels les éditeurs de presse papier sont confrontés. Et comme souvent en pareil cas, on choisit le confort, la sécurité, tout en souhaitant se transformer car l'éditeur a bien conscient qu'il s'agit d'une question vitale pour la survie de son média.

 La seconde remarque, c'est au sujet du modèle économique de cette presse écrite. Tous les éditeurs de cette presse sont inféodés au même type de propriétaire : des industriels. Tous ces titres de presse fournissent le même type de contenus, travaillent de la même manière, défendent les mêmes idées (attention, il y a des enquêtes et des analyses intéressantes dans Le Monde ou dans L'Express, mais on y lit surtout beaucoup de contenus qui se ressemblent, qui n'ont pas beaucoup d'intérêt, en plus de la publicité commerciale devenue omniprésente quasiment à chaque page). Comme presse indépendante d'industriels, il n'y a maintenant que le journal et les magazines La Croix, qui appartiennent à Bayard presse (un éditeur au sens stricte qui ne fait que de l'édition de presse et de livres).

La publicité en ligne ou sur papier glacé ou sur papier journal (en couleur, faut pas déconner, aujourd'hui quel annonceur accepterait une publicité en niveaux de gris?) est devenue un contenu primordial, pour cette presse (généralement 1 page sur 4 est une publicité en pleine page).

Les rédactions de journalistes sont pressurisés pour délivrer un contenu qui doit coûter le moins cher possible (comme dans toute activités, me dira-t-on), avec des pigistes qui remplacent des journalistes, et des envoyés spéciaux qui couvrent tout un continent alors qu'auparavant il y avait des bureaux de rédaction disséminés aux 4 coins du monde. On travaille trop souvent avec le fil Twitter et le fil AFP en permanence sous les yeux.

 Donc pour moi, l'avenir de la presse se fera en ligne ou en format numérique (podcast/téléchargement d'articles hors connexion). Google fournit des services de webmédia financé par la publicité et se rémunère grassement sur le dos d'une presse d'actualités qui ne peut pas survivre à côté (20Minutes, Numerama, Clubic, etc, sont des "survivor" d'après moi). Les journaux gagnants seront ceux qui cherchent et auront trouvé des modèles économiques qui priorisent la qualité de l'information (pas les "contenus" prémâchés qui se vendent tous seuls) : le métier de journaliste.

La publicité n'a jamais été une source de revenu adéquate pour un journalisme efficient et percutant. Toute féodalité aux pouvoirs de toute sorte (industrie, politique, personnalités influentes, annonceurs publicitaires, etc) a toujours été rejeté par des journaux émérites : je pense surtout aux journaux d'après-guerre que je connais le mieux (Le monde, Libération, mais aussi des titres à la notoriété plus confidentielle). Et on n'est pas obligé de copier le modèle de mediapart.fr, toute la valeur se trouve justement dans la différenciation, dans l'originalité et dans la qualité de l'information.

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Merci pour ton retour joma74 !

Je suis d'accord avec toi, nous sommes en train de changer de mode de consommation de l'actualité. Par exemple, j'utilise "Ok Google, écouter l'actualité" pour avoir une revue de presse audio par quelques journaux de mon choix : France Info, BBC, NYT. Cet exemple original et encore peu connue illustre, tout comme tes propres, comment nous consommons une revue très résumée et succincte d'une actualité journalière.Ces usages visent a combler, par exemple, ces moments de creux dans nos quotidien ; ou a stimuler notre activité cérébrale : le matin alors que l'on est pas très réveillé ; dans la voiture ou le métro. Et puis il y a les moments ou l'on cherche plutôt une information de fond. Quelque chose de plus approfondie, étudiée, analysée. De mon coté, ça passe par des podcasts reprenant les émissions de radio mais aussi les podcast dits pureplayer.

Je pense qu'il ne faut cependant pas se limiter a ces deux cas ; finalement, tout nos usages ont leur potentiels moment auquels des formats de presse peuvent répondre. J'aime beaucoup avoir des choses dans les oreilles, mais surement d'autres préféreront l'image, voir le texte.

Pour ta 2nd remarque, c'est vrai, je n'ai pas parlé de la dépendance des éditeurs avec des groupes industriels. D'une certaine manière, je ne la comprends pas. J'aurai pensé qu'une tel situation aurai entrainé bien plus de contrôle sur les contenu éditoriaux, mais globalement, la presse à l'air assez indépendante sur l'aspect éditorial. On verra les limites dans les cas extrêmes, éventuellement. Pour moi, elle relève plus d'une tentative de sauvetage, d'une industrie qui essaye de se serrer les coudes.

J'ai noté que la transition numérique, déjà en vue en 2010, était une transition sur ordinateur. Mais finalement, alors que la stratégies des géants, et les usages des consommateurs se tourne vers le smartphone comme objet central de notre activité ; notre compagnon et assistant de notre quotidien, c'est vers lui que les usages vont. Il existe des initiatives, comme cette application qui tout les matins propose un condensé de l'actualité : https://www.lescroissants.fr/

On pourrait aussi penser à un éditeur de presse faisant du multicanal : De la presse, de l'audio, de la vidéo, et diffusant un bouquet de contenu dans ces médiums avec divers formats.

On pourrait aussi penser que des éditeurs s'allient et prennent l’initiative de développer leur propres vecteurs de distributions et tentent de faire naitre une plateforme (sociale ?) dérivant le trafic vers celle-ci : Une telle plateforme permettrait de personnaliser une veille sur les thèmes de nos choix, issues d'articles de presse au format numérique. Il y a déjà quelques initiatives comme https://www.lekiosk.com/fr/

Bref, les idées ne manquent pas.

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Bel exercice ! (il faudra que je relise le tout à tête plus posée).

Je consomme l'information via 2 axes:

- L'actualité par agrégateur : "se tenir au courant des grandes lignes du monde"
- M'informer :" lecture de l'article détaillé d'un sujet". Très souvent j'en viens à revenir aux même source (celles qui citent leurs sources pour pouvoir rebondir et aller plus loins)

Ainsi je peux être incité à soutenir une source de presse en particulier car je sais que j'y reviens souvent.
Néanmoins il me manque un modèle de type "pourboire" où j'aurai une cagnote mensuelle qui est redistribuée en fonction des contenus que j'aurai apprécié : click bouton navigateur (mais sans vouloir aller jusqu'à l'abonnement).
Pour ces sources de presse, je suis plus dans une optique "soutenir la suite" de que de "payer pour accéder". J'étais assez en phase avec l'abonnement "soutient" optionnel nexinpact, mais hélas le modèle a montré ses limites (pas de solution parfaite). Trouver le juste milieu entre modèle viable et objectif d'information pour tous, pas simple … et un éternel débat (#Commentaires News NXI avec nos trolls usuels).

Par contre pour l'actualité j'apprécie un agrégateur avec le fait que les sujets ne sont pas mis en avant par un service éditorial. La neutralité froide (mais fausse) de l'algorithme me convient.

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On 30/10/2019 at 19:12, Sheepux a écrit :

 

Merci, pardonne mes très très nombreuses fautes, j'ai vraiment la flemme de les corriger XD

 

Concernant tes modes de consommations, je trouve qu'elles rejoignes les miennes. Le découpages entre des brèves et des articles de fonds / enquêtes. Maintenant, comment financer la presse d'une manière qui nous convient à la fois et convient aux éditeurs, c'est largement plus compliqué. Finalement, on est de moins en moins dans un modèle de marché en dualité : Offre vs Demande,

Mais dans un modèle triple : Consommation, Publicité, Création . Le flux financier va en sens inverse que la création de valeur.

 

Reste a mon sens, d'observer et de répondre aux envies des consommateurs.

J'ai aussi l'impression que la presse pourrait tirer partie des réseaux sociaux mais aussi prendre avantages du problème des fakes-news,

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